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Comment vendre des lingettes pour bébé ?

bébé

Lorsque j’ai le nez dans le chignon d’une poufiasse, le coude dans le gras du bide d’un gars trop collant, et mon bouquin prisonnier dans mon sac parce que le métro est bondé, je passe le temps en résolvant des énigmes dans ma tête. Par exemple : j’essaye de comprendre une publicité qui passe à la radio en ce moment et qui vante les mérites de lingettes pour bébé… « Pratiques pour nettoyer sans rincer la peau de votre bébé », elles sont à la fois « douces et résistantes ». Jusque là, d’accord. C’est un peu comme les yaourts fermes et fondants, les bonbons acidulés et sucrés, les culottes gainantes et sexy, ou les plats que je cuisine : crus et cramés à la fois.
Le message frôle l’oxymore pour être percutant, mais reste simple pour être bien intégré : tout a été prévu pour le popotin potelé des poupons.

Néanmoins, la réclame se termine par une phrase insolite prononcée sur le ton qu’on utilise pour les mentions légales : « Ceci est un produit cosmétique ».
Ah ? Les cosmétiques pour nourrisson sont une notion nouvelle pour moi. Je les croyais destinés à des êtres humains légèrement plus mûrs, qui espèrent justement retrouver une peau de bébé (sans songer précisément à la peau du cul d’un bébé).
Le post-scriptum de la pub est plus précis que ça : « Ceci est un produit cosmétique à usage externe ». Alors là j’arrête de penser et refuse d’envisager un usage interne quel qu’il soit.

Ce qui me dérange le plus dans cette publicité, c’est le choix de la vedette payée grassement pour associer son image au produit. Les pros de la pub ont dû rechercher le « pipole » le plus à même d’incarner leurs lingettes afin d’en vendre un maximum. Et ils se sont mis d’accord sur… Sébastien Chabal.
Je répète : Chabal.
C’est bien cela. Le colosse, rugbyman, barbu hirsute qui pique et dont la carrure ferait passer une armoire à glace pour le petit bonhomme en mousse.
En général les « communiquants » sont relativement doués, ils arrivent à manipuler le consommateur lambda, et il n’est pas impossible que quelques types, amateurs de rugby et légèrement influençables, aient soudainement envie d’acheter des lingettes pour bébé bien qu’ils n’aient pas d’enfants. M’est avis, malgré tout, que cette cible n’est pas la plus réactive ni la plus lucrative pour la marque. Et que beaucoup de mères de famille, au contraire, restent modérément sensibles aux arguments d’un rugbyman.

Sébastien Chabal, comme tout bon sportif engagé pour faire de la pub, essaye de jouer la comédie, et c’est totalement raté. Sur un ton faussement enjoué, il lit le commentaire qu’on lui a préparé :
– Enfin une lingette qui me résiste !
Oh la bonne blague.
Je tiens pourtant à faire remarquer aux publicitaires intellos que cette intervention provoque deux questions malencontreuses dans l’inconscient du consommateur :
1. Vous vendez des lingettes, mais fournissez-vous le bébé qui résiste, lui aussi, aux grosses paluches poilues d’un mastodonte ?
2. À quoi la lingette résiste-t-elle, précisément ? Aux mains du géant ou bien à son fessier ? Parce qu’en fin de compte, c’est ambigu, et l’on en vient à se demander si celui qui incarne la virilité sportive utilise des lingettes pour bébé pour son postérieur délicat.

Regardez la pub, c’est bon pour la santé

publicité

J’aime bien Félicie, de loin. Mais lorsqu’elle squatte mon canapé pour une semaine entière, je n’arrive plus à me souvenir pourquoi nous sommes amies. Les lubies de Félicie me lassent, c’est une benête qui gobe la publicité comme un merlan boulotte avidement l’asticot qui lui fait la danse du ventre au bout d’un hameçon.
Un exemple au hasard : Félicie se gave de yaourts : il y a ceux « qui rendent la peau douce », ceux qui « régénèrent de l’intérieur » et ceux qui permettent de « vivre en phase » (sic). Vivre en phase… C’est bon pour les lunatiques. Elle achète aussi du beurre qui lutte contre le cholestérol, des fruits qui attaquent la cellulite (reste à savoir s’il faut les ingurgiter ou se les coller sur le gras de la peau avec du sparadrap) et du maquillage qui fait ressembler à Kate Moss, sauf que Félicie à plus de points communs avec Josiane Balasko.

Lecteur, deux questions :

1. Choisis-tu vraiment un yaourt pour ses qualités dermatologiques ?

2. Crois-tu réellement que la belle poulette au teint de porcelaine choisie pour la publicité, qui savoure lan-gou-reu-se-ment un merveilleux yaourt et qu’on a judicieusement placée à côté d’une mocheté boutonneuse ingurgitant un yaourt normal, crois-tu réellement que cette femme soit une bonasse avec une belle peau parce qu’elle mange un « Perle de lait » chaque jour ?


À ces deux questions Félicie répond oui sans hésiter et me rétorque que ça ne coûte rien d’essayer. Et bien si, justement, quelques centimes de plus que le yaourt banalement lambda composé des mêmes ingrédients.
Félicie me prend pour une cynique acariâtre, je la prends pour une godiche crétine, c’est de bonne guerre. Lorsqu’elle veut me faire la leçon, elle prend un petit air pincé et un ton doucereux qui me hérissent le poil :


– Pourquoi as-tu acheté du saucisson, miss ?

– Comment ça « pourquoi » ? Existe-il une autre réponse que « parce que c’est bon » ?

– C’est moins bon pour ta silhouette, tu sais, miss ? On devrait trouver un club de sport près de chez toi, ce serait sympa d’y aller toutes les deux et puis, après le stress de la journée, ça nous détendrait.

– Tu devrais péter un coup, Félicie, ça aussi ça te détendrait.